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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 09:34
Dignité par Tahar Ben Jelloun

06.11.10

Une vieille dame d'au moins 80 ans est derrière le comptoir d'un grand magasin à New York, ses mains tremblent un peu, peut-être souffre-t-elle d'un début de Parkinson, elle tient la caisse. Je la regarde, pensant que c'est une cliente qui s'était trompée de côté. Non, elle est vraiment caissière, une étiquette avec son nom l'atteste. Elle s'appelle Ellen. Avec lenteur, elle déchiffre le code-barres de la marchandise, enlève les étiquettes puis a du mal avec les antivols, prend ma carte bancaire, la glisse dans la machine, me demande de signer, met les affaires dans un sac qu'elle agrafe péniblement, me le tend et me remercie en disant d'une voix à peine audible, "Next" ("au suivant").

Je suis resté un moment en retrait, interloqué et choqué, face à cette dame qui travaille plus de quarante heures par semaine. On a envie de lui demander de rentrer chez elle se reposer, mais on sait que si elle travaille encore c'est parce qu'elle en a besoin, qu'aucune retraite ne lui est versée. Elle ne fait pas ça par plaisir, d'autant plus que c'est un dimanche.

 

Vue d'Amérique, la France qui se bat pour un système de retraites juste et équitable apparaît comme une anomalie. Le New York Times du 23 octobre titre sur toute une page "Au moment où les Français font sauter les digues, les Britanniques gardent leur calme et vont de l'avant" ! L'article est illustré par une photo datant de 1979, au moment où Londres était en grève. Cet amalgame veut simplement dire : on ne comprend pas ce qui se passe en France. On aurait aimé leur répondre : qui supporterait de voir sa mère ou grand-mère travailler jusqu'à la mort ? Ce que la France est en train de sauver, c'est une qualité de vie, une autre vision du monde, une humanisation des rapports marchands.

 

Par ailleurs, on ne comprend pas pourquoi le gouvernement est si psychorigide face aux millions de citoyens qui sont plusieurs fois descendus dans les rues pour réclamer plus de justice. Est-ce si indigne de s'asseoir autour d'une table et de se parler ? Pourquoi la France s'installe facilement dans le conflit et le rapport de force ? A quoi est dû cet entêtement ? De quelle fierté est-il le nom ? Cela rappelle le cas de ces vieux couples qui ne s'entendent plus et qui ne communiquent que par des éclats de voix.

 

L'image de cette vieille dame m'a obsédé durant quelques jours. C'est l'image d'une société où l'individu est mis en avant, parfois avec arrogance, où l'argent est étalé sans honte, sans pudeur, où un travailleur peut être renvoyé à n'importe quel moment et sous n'importe quel prétexte, où la retraite dépend d'une assurance privée que tout le monde ne peut pas se permettre de souscrire. Certes, l'Amérique a de quoi fasciner, mais son système social est inadmissible. Le capitalisme sauvage domine partout. Les librairies ne mettent en avant que des livres destinés à devenir des best-sellers. On mène une lutte fanatique contre le tabac et on permet aux enfants d'avaler n'importe quoi au point de devenir obèse avant leur majorité ; la précarité est dans l'air, elle menace quiconque n'a pas su exploiter sa chance. C'est une autre manière de vivre et de mourir. Est-ce ainsi qu'on aimerait que les Français vivent ?

 

Ce qui est étrange, c'est que personne ne semble comprendre le combat des Français de ces dernières semaines. J'ai entendu des réflexions du genre : "Ce sont des enfants gâtés !" ; "ils ne sont jamais contents !" ; "ils veulent toujours plus !" ; "déjà qu'ils ne travaillent que 35 heures et ils protestent !" Décidément, plus que jamais, la France apparaît comme une exception culturelle dans ce monde de brutalité et d'égoïsme exacerbé.

 

Mais la France de Nicolas Sarkozy, et même de ses prédécesseurs, ne réalise pas sa chance. Alors elle brade ses valeurs et se retire de la scène culturelle du monde. C'est de l'Afghanistan qu'elle devrait vite se retirer, rapatrier ses soldats promis à une débâcle certaine (à présent que c'est Ben Laden qui l'exige, les 3 750 soldats français ne rentreront pas de sitôt). Non, la France officielle ne cesse de réduire le budget de ses instituts culturels dans le monde. Elle abîme son image, réalise quelques économies (il en faut pour payer la présence en Afghanistan), mais elle fait fausse route, elle fait une grave erreur. C'est avec la culture, avec ses productions littéraires, théâtrales, musicales, picturales, cinématographiques, avec ses valeurs humanistes, son héritage des Lumières qu'elle assurera une belle présence, laquelle lui faciliterait des réalisations économiques importantes. Le pari sur la culture est le seul qui vaille. Or, le ministère des affaires étrangères fait des économies ridicules tout en continuant à espérer que la voix de la France sera entendue et respectée. Calcul de petit épicier sans envergure, sans vision à long terme.

J'ai rencontré des intellectuels américains qui se souviennent avec nostalgie de l'époque où la France était célébrée dans les universités à travers des visiteurs comme Michel Foucault, Jacques Derrida, Alain Robbe-Grillet, Mohammed Arkoun et d'autres. Aujourd'hui, ils se demandent ce qui se passe en France, pourquoi sa voix n'est plus entendue.

 

Je reviens à la vieille dame américaine. Je revois son expression fatiguée, ses bras frêles, sa voix faible. En France, elle serait dans une maison pour personnes âgées. Peut-être serait-elle entourée de ses enfants et petits-enfants, peut-être serait-elle triste d'avoir été mise à l'écart dans un hospice, mais elle ne serait pas caissière dans un magasin de fringues. Piètre consolation. Car si le système des retraites n'est pas réformé en se basant sur les propositions des syndicats et des partis qui défilent dans les rues, nous serons tous un jour cette vieille dame devant travailler jusqu'au dernier jour de sa misérable vie.


Ecrivain et poète, Tahar Ben Jelloun est membre de l'Académie Goncourt depuis 2008. Il a reçu le prix Goncourt pour "La Nuit sacrée" (Points Seuil) en 1987. Derniers livres parus, "Jean Genet, menteur sublime" et "Beckett et Genet, un thé à Tanger" (Gallimard

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5 octobre 2010 2 05 /10 /octobre /2010 08:22
 



En juin 2009, la Fondation Copernic et le Monde Diplomatique ont organisé un

 

colloque intitulé « L’Etat démantelé ». Vous pouvez retrouver les interventions des intervenant-e-s de ce colloque sur le site de la Fondation Copernic.

Les actes de ce colloque viennent d'être publiés aux éditions La Découverte sous le titre, L'Etat démantelé. Enquête sur une révolution silencieuse.

Cet ouvrage a été coordonné par Laurent Bonelli et Willy Pelletier.

    - Laurent Bonelli est maître de conférences en science politique à l’université Paris-X (Nanterre) . Il a co-dirigé l’ouvrage La Machine à punir. Pratiques et discours sécuritaires (L’Esprit frappeur, Paris, 2001) et publié, à La Découverte, La France a peur (2008). Il est par ailleurs membre de la rédaction du Monde diplomatique.

    - Willy Pelletier, sociologue à l’université de Picardie, est coordinateur général de la Fondation Copernic depuis 1998. Il a notamment publié, avec Claire Le Strat, La canonisation libérale de Tocqueville (Syllepse, 2006).

Dans le débat public, les diagnostics alarmistes sur la « crise de l’État-providence », et les procès contre l’État-redistributeur, ont laissé place à toujours plus d’injonctions à « réformer l’État ». Cet impératif est devenu le point de ralliement d’élites politiques (de droite comme de gauche), de hauts fonctionnaires nationaux et internationaux, mais aussi des intellectuels les plus en vue, de journalistes, voire de certains syndicalistes. Que recouvre cette « réforme de l’État » ? Comment a-t-elle été mise en œuvre depuis vingt ans ? Quelles conséquences pour le service public et les usagers ? Ce livre s’efforce de répondre à ces questions en faisant dialoguer des chercheurs, des fonctionnaires et des syndicalistes. L’échange d’analyses et d’expériences permet de dessiner les lignes de force de ce mouvement, tout en restant attentif aux singularités observables. Ce travail intellectuel et collectif est nécessaire pour comprendre une révolution silencieuse. Car, si les réformes néolibérales de l’État s’effectuent parfois à grand renfort de publicité (privatisation de La Poste, restrictions des budgets de l’hôpital public ou de l’Éducation nationale), elles sont le plus souvent invisibles, et ne rencontrent que des protestations sectorielles, peu coordonnées, encore moins médiatisées. Elles passent par tel décret, telle directive, telle circulaire, voués à demeurer obscurs et confidentiels, dans certains cas élaborés par des cabinets d’audit privés… La plupart, et parmi les plus structurelles, passent inaperçues, sauf pour ceux qui en affrontent directement les conséquences… Au terme de ce voyage dans la « réforme de l’État » et ses effets, c’est l’avenir des services publics, de nos services publics, qui est en jeu. C’est-à-dire celui d’un modèle de société.

Pour (re)voir les interventions filmées du colloque et écouter une interview de Willy Pelletier sur France Inter, cliquez ici :
http://www.fondation-copernic.org/spip.php?article301

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1 septembre 2010 3 01 /09 /septembre /2010 11:09
Jean-Luc Porquet : "Défendre le rêve porté par les résistants"

 

L’extrait ci-dessous provient de l’entretien de Jean Luc PORQUET publié sur le site ARTICLE XI . Nous vous en conseillons vivement la lecture... c’est par ici

"L’an passé, ils étaient 4 000, réunis sur le plateau des Glières pour dire - sans bannière politique ni drapeau - leur rejet des valeurs sarkozystes. Manifester leur opposition aux présidentielles tentatives de récupération sur l’héritage de la résistance. Et souligner leur volonté de ne pas rester passif face aux coups de butoir incessants que la majorité au pouvoir et les milieux d’affaire assènent au modèle social français. Cette année, ils remettent ça, rassemblement organisé le dimanche 16 mai par l’association Citoyens Résistants d’Hier et d’Aujourd’hui [1]. Une "manifestation" qui s’inscrit dans un cadre plus vaste, patient et minutieux travail de fond mené par les membres de l’association pour préserver et rappeler l’héritage du Conseil national de la résistance. Ainsi de Walter, retour en résistance, film réalisé par Gilles Perret autour de la figure de l’ancien résistant Walter Bassan [2]. Ou du livre publié récemment par l’association à La Découverte, ouvrage collectif conduit par un journaliste du Canard Enchaîné, Jean-Luc Porquet.

 L’ouvrage est bref, efficace et percutant. En moins de 200 pages, il revient sur l’application dans l’immédiat après-guerre des Jours Heureux, texte programmatique rédigé en 1944 par le Conseil national de la Résistance (CNR) et qui a très largement irrigué le modèle social français. Et détaille précisément les coups qui lui sont ensuite portés de tous côtés : politiciens de droite et de gauche, financiers, assureurs, banquiers, grands patrons, tous soucieux de prendre leur revanche. De ravager, - « avec une furie qui n’exclut pas une certaine méthode », pour reprendre les mots d’Alexandre Dumas - le système de Sécurité sociale et celui des retraites, de rogner les services publics, de mettre à bas toute idée de secteur bancaire public, de multiplier les privatisations, d’œuvrer à la déréglementation financière, d’asservir la presse au capital, etc… Bref, de laminer tout ce qui, de près ou de loin, représente une quelconque entrave à ces marchés qui se piquent de gouverner nos vies.

Qui mieux que Jean-Luc Porquet, coordinateur de l’ouvrage, pour en parler ? Nous avons rencontré ce journaliste rappelant avec une jolie verve - dans le livre comme dans ses chroniques au Canard - que « face à cette entreprise de démolition systématique, il faut imaginer des voies nouvelles et de nouvelles résistances ». Le mieux, c’est de lui laisser la parole…

Ce livre, il vient d’où ? En mai 2009, je me suis rendu au rassemblement des Glières : ce fut une journée vraiment magnifique, avec des gens formidables. La veille déjà, j’avais été convié à une grande tablée, me retrouvant en compagnie des anciens résistants Stéphane Hessel, Raymond Aubrac et de l’écrivain John Berger. Stéphane Hessel - au passé de héros, résistant, arrêté par la Gestapo, déporté - était juste en face de moi, et cet homme de 93 ans faisait preuve d’une vivacité impressionnante, avec quelque chose de juvénile, d’optimiste. Une telle présence – héroïque et engagée – ne s’oublie pas, surtout quand elle se double d’un enthousiasme que beaucoup d’entre nous ont perdu.

Le lendemain, nous étions 4 000 personnes à participer au rassemblement. Le temps était magnifique. Juchés sur la petite plate-forme d’une camionnette, Stéphane Hessel, Raymond Aubrac, Alain Refalo (l’un des premiers enseignants "désobéisseurs") et le psychiatre Michaël Guyader ont donné à entendre des interventions aussi brèves que fortes. Hauteur de vue, combativité, absence de complaisance : c’était impressionnant. Et puis, il n’y avait pas ce côté boutiquier où chacun arrive avec son petit autocollant, sa petite banderole, son officine à défendre : les organisateurs avaient demandé aux participants de venir sans tract, sans l’appareillage habituel du militant. Bref, il y avait quelque chose de très fort, de vivant.

( la suite sur ARTICLE XI)

 

Article voir le lien

http://www.citoyens-resistants.fr/

 

Pour commander le livre voici le lien

 

http://www.la-breche.com/catalog/index.php

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19 juillet 2010 1 19 /07 /juillet /2010 13:56

ALBERT NALLET, l'auteur bressan du livre "On n'efface pas la vérité"

vous invite à regarder la projection du film inédit :

 

 "Audin, la disparition"

Lundi 19 juillet 2010 à 18 h 30 et 22 h 30

Samedi 24 juillet à 22h  et  dimanche 25 juillet à 18 h

Sur LCP/PUBLIC SENAT (canal 13 de la TNT)

 

avec Josette Audin, son épouse

 

Henri Alleg, Directeur d’Alger Républicain, torturé avec Maurice Audin, Auteur de « La Question » qui révéla la torture pratiquée en Algérie.

Ainsi que de nombreux témoins : anciens appelés du contingent et anciens combattants algériens dont Djoudi ATTOUMI

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14 juillet 2010 3 14 /07 /juillet /2010 21:04

CONCERT MALHORY AFFICHE-1-[1]

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29 avril 2010 4 29 /04 /avril /2010 18:35
Restau/concert du Rock Agricole !
 
 
Samedi 15 mai , à la maison du peuple d' Hauteville (Espace accueil-salle des fêtes), grande soirée avec Dadi et Charlie.
Ouverture des portes à 19 heures 30, 2 euros l' entrée, 6 euros le repas avec des produits locaux, buvette et table de presse...
 
                                   
 
"Ces 2 phénomènes nous offrent des moments de rire avec des textes très bien écrits, une gestuelle bien étudiée et des chansons hilarantes, tout en nous offrant une critique subtile de notre société moderne tellement réaliste. A voir et à revoir pour comprendre tous les jeux de mots !"
 
                                                       
En after : Scène ouverte !
Folkeux, Rockeux; chanteux, rapeux, amenez vos instruments, micros et sono seront à disposition !
 
 
 
     
 
     

 

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15 mars 2010 1 15 /03 /mars /2010 19:39

*HOMMAGE A JEAN FERRAT*
envoyé par DELYZA. - Films courts et animations.

Un grand Monsieur nous a quitté aujoursd'hui* pour tous ceux qui l'ont aimé**Il restera toujours dans nos coeurs avec sa voix merveilleuse, sa poésie.
Un poème d'Aragon qu'il a si souvent chanté***
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12 février 2010 5 12 /02 /février /2010 10:39

Grand Corps Malade - Education Nationale
envoyé par GrandCorpsMalade. - Regardez plus de clips, en HD !


pour info, il revendique notamment ... 15 élèves par classe dans les "quartiers en galère...récuse l'enseignement à deux vitesses, aide aux devoirs .... y'a pas d'éducation y'a que des moyens de survie locaux ...tout y est ... à méditer  ? ;-) )
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«Education nationale» : Grand Corps Malade au tableau

Par Sophie Delassein

Ce matin, sur la quatrième de couverture de «Libération», on pouvait lire un slam de Grand Corps Malade intitulé «Education Nationale», où «l'égalité des chances» est «un concept de ministère» (voir la vidéo ci-dessous). Comme la démarche est peu banale, j'ai illico téléphoné à Fabien, alias Grand Corps Malade, pour comprendre de quoi il retourne.

«Ce slam, je l'ai écrit il y a six mois, selon l'inspiration du jour – comme chaque fois. Il n'est sur aucun de mes deux albums, mais, depuis le mois de janvier, je l'intègre à mon spectacle en tournée. Les réactions sont à chaque fois très bonnes. Il est même arrivé que le public se lève pour l'applaudir. A la sortie, on me demande où on peut le trouver. Si bien que j'ai fini par en faire un clip, à la hâte, avec mon réalisateur attitré Mehdi Idir. Nous l'avons tourné dans une école de Saint-Denis.

Le thème de l'école m'intéresse et me préoccupe. Mais l'idée (ou le déclic) m'est venue lors d'un atelier d'écriture avec des élèves de CM2, dans une école d'Epinay. J'ai rencontré une institutrice pleine de bonne volonté, qui bosse comme une folle. Pour organiser une sortie avec ses élèves à la Cité des Sciences, comme on ne lui donne aucun moyen de le faire, elle a mobilisé ses élèves pour qu'ils gagnent des places sur Internet. J'ai trouvé ça tellement triste et déplorable qu'on puisse en arriver là. Vous vous rendez compte, elle n'a pas les moyens d'emmener ses élèves en sortie !


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Je n'attends rien de l'Education nationale,mais je ne comprends pas que les professeurs soient si mal payés quand on sait quelles responsabilités pèsent sur eux. Ils doivent assurer l'enseignement, le confort et la sécurité de trente enfants quotidiennement. J'ai beaucoup de respect pour eux et je suis scandalisé qu'ils soient à ce point dévalués au niveau du salaire. J'ai eu envie de réagir.

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A mon niveau, je fais ce que je peux. Je n'ai rien à faire dans des réunions ministérielles, je n'ai aucune légitimité. En revanche, je rencontre des élèves, j'anime des ateliers d'écriture et de slam, je fais inviter des jeunes à des concerts (et pas seulement à mes spectacles).»

Grand Corps Malade

(propos recueillis par Sophie Delassein)

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1 novembre 2009 7 01 /11 /novembre /2009 13:06
Un livre d'actualité, à lire... et à faire connaître !

Vient de paraître

ORANGE STRESSÉ

Le management par le stress à France Télécom


Ivan du Roy


Postface de Patrick Ackermann et Pierre Morville,
délégués syndicaux centraux de France Télécom



Collection : Cahiers libres – 252 pages – 15 €




France Télécom est devenue un géant mondial des télécommunications. L’ancienne entreprise publique est présentée comme le modèle d’une privatisation réussie, dans un secteur qui connaît une extraordinaire mutation technologique. Mais il y a un grave revers à cette médaille, beaucoup moins médiatisé que les profits records de la firme safran : parmi ses 100 000 salariés hexagonaux, deux sur trois se déclarent stressés. Un mal-être généralisé qui a pour symptômes la banalisation du recours aux anxiolytiques, la progression des arrêts maladie de longue durée, l’augmentation des démissions et la multiplication troublante de suicides.

C’est cette réalité méconnue que dévoile ce livre, fruit d’une enquête auprès de salariés, de syndicalistes, de médecins ou d’experts en santé au travail. Et qui s’appuie également sur les travaux de l’Observatoire du stress et des mobilités forcées à France Télécom, créé à l’initiative d’organisations syndicales. Ivan du Roy y montre comment le « management par le stress » a été érigé en système par les dirigeants de l’entreprise, dans le but notamment de pousser vers la sortie des milliers de salariés. Ce management « sournois » et « vicieux » – selon les mots des salariés – s’est progressivement déployé avec la privatisation, alors que les profits s’accroissaient.

En ce sens, le cas de France Télécom est tristement exemplaire : c’est un laboratoire pour la gestion du personnel par la souffrance au travail, une expérimentation de ce qui peut se produire demain dans d’autres grandes entreprises et services publics, de La Poste à l’Éducation nationale.

Ivan du Roy est journaliste à Témoignage chrétien et collaborateur du magazine en ligne Basta !


www.editionsladecouverte.fr



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13 septembre 2009 7 13 /09 /septembre /2009 19:54
L’ARGENT NOIR DES SYNDICATS

jpg_argent-noir-des-syndicats-fb52f.jpg

René ADDSKI a lu le livre de Roger Lenglet, Jean-Luc Touly et Christophe Mongermont, paru chez Fayard en mai 2008 et a rédigé la critique ci-dessous pour Dieppe3D. Il explique que "La lecture de ce livre est nécessaire : il lève un voile sur le sujet tabou qu’est le financement des syndicats" et "dans la région dieppoise, ce livre nous concerne aussi évidemment et peut-être plus qu’ailleurs".

Au printemps dernier, un livre sur les syndicats était publié avec peu d’échos de la part des organisations politiques se réclamant de la classe ouvrière et encore moins – mais c’est logique ! - de la part des confédérations syndicales. Avec un tel titre, « L’argent noir des syndicats » (1), on pouvait croire au premier abord qu’il s’agissait d’un ouvrage provenant d’auteurs bien réacs, anti-syndicalistes et issus de la presse bourgeoise.

 

Pas du tout, il s’agit au contraire d’un brûlot que tout militant syndical et/ou politique se battant sur des positions de lutte de classe et d’émancipation pour le prolétariat doit absolument lire. Il s’agit en effet d’un ouvrage dénonçant la corruption des syndicats et permettant de dévoiler un certain fonctionnement du syndicalisme qui nuit à la lutte de classe, aux luttes de défense pour des intérêts immédiats des travailleurs/ses et qui étouffe dans l’œuf tout espoir de lutte organisée de la classe ouvrière (mais aussi d’autres catégories chez les travailleurs salariés ou non), en faisant croire que tout se règle par des moyens légaux et démocratiques (au sens bourgeois), des rencontres et des discussions au sommet où les principaux concernés – les prolétaires - ne sont évidemment pas conviés. En gros, le livre dénonce le travail de sape des bureaucrates et de nombreux délégués syndicaux et explique les raisons de cette dérive qui a neutralisé ces organisations de lutte et fait chuter le taux de syndicalisation en France, grâce à une étude minutieuse due à des témoignages et à des documents, dans une époque qui devrait connaître, au contraire, de grandes mobilisations quotidiennes et non fractionnées et des luttes dans les entreprises et les quartiers pour contre-attaquer la bourgeoisie (patronat et gouvernements en tête) et ses contre-réformes libérales et impérialistes à coups de décrets.

 

Au moment de la rédaction de ce livre, son trio d’auteurs ne pouvait pas avoir plus de chances car il allait se trouver en pleine actualité avec l’affaire de l’UIMM qui éclatait au grand jour. Sans compter que ses auteurs savent de quoi ils parlent. En effet, ceux-ci se nomment Roger Lenglet, philosophe et journaliste d’investigation notamment spécialisé dans les affaires de corruption, auteur de plusieurs ouvrages dont deux sur les multinationales de l’eau en collaboration avec Jean-Luc Touly, autre auteur de ce livre sur l’argent noir. Touly, membre d’Attac et président de l’Association pour le Contrat Mondial de l’Eau (2), fut n°2 de la CGT chez Veolia (ex-Vivendi Générale des Eaux) avant d’être viré par son syndicat puis par la multinationale au début 2006 après des attaques en justice par celle-ci (et autant de procès perdus) pour ses écrits et son combat pour re-municipaliser l’eau. Le troisième auteur est Christophe Mongermont qui fut aussi délégué syndical à la Générale des Eaux puis secrétaire général des syndicats de FO en 1998 avant d’en être viré par le groupe Vivendi (devenu Veolia depuis) en 2004 (3) avec l’aide du Ministère du Travail pour avoir combattu le système Messier et refusé de se laisser corrompre (d’autres syndicalistes de la multinationale subiront le même sort par la suite). Ils ont d’ailleurs obtenu tous les trois des récompenses en 2006 pour leurs combats contre la corruption (dans le monde syndical mais aussi chez les élus).

 

Leur livre débute sur un chapitre en phase avec l’actualité. Intitulé « 45 000 patrons assurés d’avoir la paix », il explique ce qu’est l’Union des Industries et des Métiers de la Métallurgie, branche du Medef, au nom quasiment inconnu pour beaucoup, qui n’en est pas moins la plus forte et la plus influente de la confédération patronale. Née sur les cendres du Comité des Forges créé en 1864 par notamment le fait d’un de Wendel et d’un ancêtre du baron Seillières, elle fédère non seulement les restes de cette industrie mais aussi les entreprises de la plasturgie, de la construction automobile, de l’électronique, du nucléaire, des équipements ferroviaires et de la construction navale, donnant presque tous les présidents du Medef et de son ancêtre, le CNPF, depuis la seconde guerre mondiale. La corruption et les tentatives de corruption de délégués et des bureaucrates syndicaux en liant avec elles y sont dévoilées, cette affaire n’étant qu’un révélateur sur les pratiques habituelles du patronat envers les syndicats (à l’instar de celui du financement des partis politiques il y a quelques années).

 

Les chapitres qui suivent ont pour sujet le fonctionnement et le financement des Comités d’Entreprise de la SNCF et d’EDF ; la situation au sein des entreprises de nettoyage où la sous-traitance est omniprésente avec une main d’œuvre principalement féminine, précaire, immigrée ou d’origine ou issue des DOM-TOM (confettis coloniaux de la France) où corruption et répression sont partout car, dans ce secteur, les conditions de travail, les horaires, les problèmes de santé (dus aux produits utilisés) et les salaires justifient des tentatives d’organisation qui ont donné de nombreuses grèves ces dernières années (parfois très longues et très dures); et Dalkia, filiale d’EDF et de Veolia.

 

Les autres de cette première partie sont consacrés aux « licenciements » à prix d’or de syndicalistes et à leur éviction quand ils sont jugés trop actifs, donc trop combatifs, en donnant des exemples sur les positions courageuses de certain(e)s syndicalistes qui, en refusant ces pratiques, se retrouvent alors confrontés à une répression et à un harcèlement quotidiens d’une ampleur qui laissent toujours des séquelles... ; aux financements des caisses de formation professionnelle ; aux mairies qui abritent les syndicats (avec détournements d’argent et emplois fictifs à la clé) ; aux diverses sources de financement des syndicats (publicité, fuites budgétaires, fonds et subventions détournés) ; à la FNSEA dans un chapitre très instructif sur la politique agricole qui sévit depuis des années et pousse à la faillite et à la disparition des petits exploitants dans un processus qui s’accélère ; et, enfin, au système des cotisations syndicales et donc au financement des confédérations (grâce à une loi datant de 1884 !) dans un pays qui connaît l’un des plus bas taux de syndicalisation de l’Europe et où depuis les années 70, le nombres de syndiqués a été divisé par 5 alors que dans le même temps les « syndicalistes professionnels » (selon la très bonne formule des auteurs !) ont vu leur nombre être multiplié par le même chiffre…

 

 

La seconde partie est divisée en trois chapitres. Le premier est consacré aux effectifs des syndicats et le suivant à la contre-réforme de la carte judiciaire qui a fait grand bruit, il y a quelques mois, par, notamment, des manifestations de magistrats. Mais les auteurs ont le mérite de dénoncer ou de rappeler le fait qu’elle cachait dans le même temps la réduction de 25 % du nombre déjà insuffisant de conseils des prud’hommes (avec limitation des conditions d’exercice du mandat prudhommal) dans une période où ils sont de plus en plus sollicités et cela grâce au silence des journalistes à la complicité – du fait de leur indifférence au sujet - des bureaucrates syndicaux. Quant au troisième, il fait état des « guerres intestines » dans les syndicats et les confédérations montrant qu’il y a et qu’il restera toujours des syndicalistes refusant de se laisser acheter et corrompre par le patronat et les différents pouvoirs et qui continueront leur combat contre le patronat et leurs collabos, évoquant dans le même temps la répression que subirent les deux auteurs ex-syndicalistes à la Générale des Eaux.

 

Arrive la conclusion d’actualité puisque, lors de sa rédaction, un scandale identique à celui de l’UIMM éclatait en Allemagne avec le procès de syndicalistes de Volkswagen qui avaient été soudoyés par leur patronat (dessous-de-table, vacances dans des palaces, prostituées et alcool…). Mais elle met parfaitement en relief que « la désyndicalisation paraît plutôt découler des effets pervers du système de perfusion qui ont éloignés les organisations du terrain quotidien des salariés » et que « cette situation de pourrissement ne donne pas seulement lieu à une désaffection des salariés, mais à une instrumentalisation des syndicats par les entreprises et les gouvernements qui parviennent ainsi à obtenir une « paix sociale » à discrétion et des accords a minima, moyennant une éviction des syndicalistes qui refusent de se plier », qu’il faut « relancer la culture syndicale à la base… ».

 

En bref, le livre démontre qu’il faut se battre contre le « syndicalisme de négociation » et revenir à un syndicalisme de lutte indépendant malgré les difficultés et le long travail que cela demande. Mais y a-t-il d’autres choix dans cette période très difficile qui voit l’augmentation de la paupérisation du fait de la hausse continuelle du coût de la vie, de l’omniprésence de la précarité et de la destruction d’avantages sociaux (retraites, sécurité sociale, système éducatif…) suite à des contre-réformes qui seraient passées si le PS était au pouvoir avec ses « amis » (mais de manière moins brutale) et qui n’ont pas été combattues par les directions syndicales (dont certaines tentent de nous faire croire qu’elles ont été trahies par le Medef et l’équipe de Sarkozy-Fillon) ? Et où le paysage politique connaît des restructurations à l’instar de l’économie ?

 

La lecture de ce livre est donc nécessaire car s’il lève un voile sur le sujet tabou qu’est le financement des syndicats et qu’il démontre que l’argent est le nerf de toute guerre et donc de la guerre de classe, il démontre que la corruption au sein de la première arme de défense des esclaves du capitalisme – le syndicat – existe non seulement dans le privé mais aussi dans les services publics (ou du moins de ce qu’il en reste) mais aussi dans d’autres patrons comme au sein des mairies et notamment celles où les patrons sont des « camarades » et vice-versa.

 

Dans la région dieppoise, ce livre nous concerne aussi évidemment et peut-être plus qu’ailleurs. En effet, il nous parle de Veolia (qui bâtit et étend son empire sur les cendres de Vivendi en grignotant un à un les services publics et certaines sociétés grâce notamment au système de la décentralisation) et donc de Dalkia (l’une des rares filiales de Veolia qui a conservé son nom pour l’instant), d’EDF (très présent avec ses deux centrales nucléaires dans la région), de la SNCF (rappelons-nous la bataille qu’ont dû livrer des usagers, des citoyens et de certains élus pour développer la ligne de chemin de fer !), de la FNSEA (nous sommes dans une des régions les plus riches dans le secteur agricole et la situation empire chaque année pour les petites exploitations qui survivent) et parce que le chapitre consacré à l’hébergement des syndicats par les mairies est presque exclusivement basé sur une affaire locale qui rappellera sans doute de mauvais souvenirs à certains…).

 

Un ouvrage à lire absolument parce qu’il dénonce des pratiques scandaleuses et une bureaucratie vendue mais tout en donnant brièvement des remèdes appelant à « relancer la culture syndicale à la base… » (6). Et parce qu’il n’est pas contre le syndicalisme mais contre le « syndicalisme de négociation » et redonne de l’espoir en démontrant que si le sommet des grandes centrales syndicales est corrompue et qu’une partie des délégués l’est aussi, la majorité des effectifs syndicaux ne l’est pas et fait son travail. C’est pourquoi, il doit être lu avec une pensée pour ses auteurs et ceux et celles qui ont témoigné et qui ont subi, subissent ou subiront le harcèlement et la répression de leurs exploiteurs et du système et ont dû faire face aux tentatives de corruption ou devront y faire face un jour ou l’autre.,

Possible commande librairie la BRECHE
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