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Ce début de semaine, Sarkozy est revenu au « contact » de la « France qui se lève tôt ». Lundi,c’était devant les salariés de Poclain, à qui il est allé présenter sa nouvelle idée pour augmenter le pouvoir d’achat sans augmenter les salaires, par la promotion de la participation et de l’intéressement, vantant ce qu’il appelle une «
vision non pas antagoniste, mais réconciliée, harmonieuse et efficace des liens entre le travail et le capital ». Non sans
promettre au passage un « défraiement » aux patrons, aux frais du contribuable, sous forme d’un crédit d’impôt de 20 % des sommes
versées…
Mardi matin, opération séduction, aux aurores, du côté de Rungis, où on a pu les voir, Carla et
lui,serrer des mains et déguster du camembert, tout en évitant soigneusement la rencontre avec les mareyeurs. Il a couru ensuite à RTL, présenter son « plan » contre les hausses du prix des carburants : prendre sur les
excédents de TVA touchés par l’Etat du fait de l’augmentation des carburants pour financer une baisse des prix pour les professionnels,
ainsi qu’un soutien aux plus pauvres sous forme de « prime à la cuve » et de maintien du prix du gaz. Une promesse qui n’a que peu de
chances d’être tenue puisque la baisse de consommation induite par la hausse de prix a entraîné, en 2007, une baisse du
produit de la TIPP (taxe intérieurs sur les produits pétroliers) qui n’a été que peu compensée par la hausse du produit de la TVA.
Sarkozy bluffe. Il tente de reprendre la main alors que même les députés de son propre
bord manifestent leur révolte, comme certains UMP présentant et votant mardi soir, avec le PS, un amendement introduisant le principe de la parité homme-femme « aux
responsabilités professionnelles et sociales », malgré les interventions de Rachida Dati, inconditionnelle du Président, venue défendre laposition du gouvernement
contre cet amendement. Le président de l’Assemblée, Accoyer, s’est même permis de la faire taire, en lui rappelant que
« tout le monde suit le texte depuis le début
» et qu’on « ne va pas reprendre dix fois les mêmes explications »…
Sarkozy cherche à faire face à une contestation sociale qui ne
cesse de s’étendre, alors que la grève des marins-pêcheurs, loin de s’éteindre, se propage aux autres pays d’Europe et commence à toucher
les transports routiers et les agriculteurs. Ces manifestations de professions menacées dans leur existence
même par le développement de la crise s’ajoutent aux luttes pour les salaires qui touchent de nombreuses entreprises, ainsi qu’aux mobilisations contre les suppressions de postes dans la fonction publique et contre les
nouvelles attaques du gouvernement sur les retraites. La population laborieuse et les salariés doivent faire face à une dégradation
permanente de leurs conditions de vie, du fait des attaques à répétition du gouvernement et du patronat, mais aussi des
effets d’une crise qui ne cesse de s’approfondir et dont les conséquences se font directement sentir. Des
statistiques récentes font état d’une baisse de 27,9 % du nombre de constructions neuves en 2007. C’est l’illustration concrète du résultat de la combinaison de la baisse des revenus, de l’augmentation du prix
des matières premières et des difficultés à obtenir un crédit, sans oublier la menace sur l’emploi dans le secteur du bâtiment. Une illustration directe des effets et du mécanisme d’une crise qui est en train de gagner
l’ensemble des secteurs de l’économie. Sourds à une situation sociale qui ne semble pas les concerner, les caciques du PS viennent de
lancer leur grande offensive… pour la direction du parti et la présidentielle de 2012. Premiers candidats au
poste de « chef », Royal et Delanoé font semblant de s’affronter sur la question de savoir si «
socialisme » et « libéralisme » sont compatibles. Pour Delanoé, c’est oui. Dans un livre intitulé De l’audace, il précise
: le libéralisme, c’est « une doctrine de liberté et de justice dans une
société imparfaite et non une doctrine de lutte de classe qui nous promet une société égalitaire et parfaite
». Une définition qui peut représenter, sur le fond, ce
qu’est le « socialisme » pour Ségolène Royal… Sur le plan parlementaire, c’est la bataille sur le front du projet de modification des
institutions de la République. Une bataille au cours de laquelle le PS, d’accord sur le fond de la réforme avec l’UMP, négocie par
la bande un découpage électoral qui lui garantisse une répartition « équitable » des postes permettant d’accéder à la mangeoire de l’Etat : Assemblée nationale, Sénat, Conseils régionaux et généraux. PC et Verts sont
noyés dans le sillage du PS. Les organisations syndicales, elles, s’enlisent toujours plus dans le dialogue social. Après
l’accord sur la représentativité syndicale dans le privé, six organisations syndicales de la Fonction publique
(CFDT, CGT, FSU, UNSA, Solidaires, CGC) viennent de signer avec le gouvernement un « accord sur le
dialogue social ». A la grande satisfaction de Sarkozy et se gouvernement, qui se félicitent de ce qu’ils considèrent comme un «
accord historique pour le dialogue social dans la fonction publique
depuis 1946 ». Accord qui, selon eux, ne
peut manquer de « favoriser le passage d’une culture de l’affrontement
à une culture de compromis »…
Pour leur donner raison sans plus tarder, mardi 27, certains syndicats enseignants annonçaient
qu’ils mettaient fin à la mobilisation contre les suppressions de postes, en proposant de se retrouver fin août
pour discuter des actions de la rentrée... Le prétexte invoqué est de ne pas nuire aux élèves passant leurs examens, ainsi qu’une soi-disant baisse de la mobilisation. Baisse de la mobilisation, si tant est qu’elle existe, qui
n’est que la conséquence des tergiversations des confédérations syndicales, de leur volonté clairement comprise par tous de ne rien faire
pour la convergence des luttes, autrement dit pour se donner les moyens de gagner. Bien au contraire, les manifestations du 15, puis celles du 23, ont montré que, malgré le manque de préparation et de
perspectives, de nombreux salariés de la fonction publique mais aussi du public ont tenu à manifester leur ras-le-bol. Elles sont la preuve
que la détermination à se battre existe, que la colère est profonde. Colère que ne peut que renforcer l’annonce des augmentations des «
salaires » des PDG du CAC40, 58 % en un an, passant d’une moyenne de 2,53 millions d’euros à 4 millions
!
Sarkozy prône l’harmonie « des liens du travail et du capital ». Le PS lui fait écho, tandis
que les confédérations syndicales s’enferment dans le carcan du dialogue social. Les travailleurs, la
population,doivent faire face aux difficultés sans cesse croissantes, produit de la lutte de classe sans fin et sans
limites que mènent les capitalistes. La nécessité d’une riposte réelle du monde du travail, d’une offensive pour mettre un terme aux attaques mais aussi pour reprendre l’offensive sur nos propres revendications s’impose. Le regroupement nécessaire à la riposte repose sur notre propre initiative, en toute indépendance
des partis institutionnels et des directions syndicales. Il ne peut se faire qu’autour d’un plan d’urgence,
rassemblant en un tout cohérent les exigences de toutes les catégories de travailleurs et de la population. Il passe par le regroupement dans les syndicats comme sur le plan politique de toutes celles et tous ceux qui pensent
qu’il est temps de se donner les moyens de défendre leurs propres intérêts, en toute indépendance de classe, loin des calculs des
bureaucraties plus soucieuses de leurs intérêts d’appareil que de ceux des salariés. Une telle politique désarme et démoralise. Reprendre
l’offensive exige en tout premier lieu de nous regrouper pour reprendre l’offensive sur le plan politique pour contester
radicalement les lieux communs, les fausses évidences des libéraux de droite ou de gauche, pour contester le droit des patrons et des financiers à diriger l’économie, à plier toute la société à leurs besoins, pour
faire valoir les droits des travailleurs.
Eric Lemel
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